Page images
PDF
EPUB

Dans le mémoire présenté par le ministre aux Cortès, les dépenses se décomposent ainsi :

La maison royale et les corps législatifs ne comportent ni augmentation ni diminution. Sur la dette publique, il y a une augmentation de 28.687.204 pesetas; sur les charges de justice, de 23.526. A la présidence du conseil, on économise 168.000 pesetas; au ministère d'Etat, 181.629; au ministère de Grâce et Justice, 294.731; au ministère de la Gobernacion, 3.862.000. A la Guerre, il y a une augmentation de 28.400.000; à la Marine, de 3.151.073; au Fomento, de 7.309.533, et aux Finances, de 492.551

dépense 937.178.133 pesetas.

total de

Quant aux recettes, elles sont évaluées à 937.230.415 pesetas. L'effet que la lecture du détail du budget, surtout du budget des dépenses, produisit sur l'opinion publique, fut désastreux. On accueillait favorablement ce qui avait trait à la dette avec ses réductions moyennant l'impôt. Mais on considérait comme une plaisanterie de vouloir exiger du pays des sacrifices nouveaux sans avoir au préalable réduit les dépenses au strict minimum. Comment accorder à la guerre une augmentation de 28 millions? Pourquoi ne pas rogner sur la liste civile ? N'avions-nous pas perdu les colonies? N'avions-nous pas perdu un peu de notre importance internationale ? Les économies proposées étaient dérisoires.

M. Costa, président de la Ligue Nationale des producteurs, se faisant l'écho d'une foule de citoyens, appréciait ainsi le budget: « Le budget présenté par M. Villaverde n'est pas le budget d'un peuple normal et bien constitué qui a résolu toutes les difficultés, moins celle des finances déséquilibrées momentanément comme conséquence d'une guerre malheureuse. A la différence du Maroc où la nation a fait faillite, mais non les finances, ici ce sont les Finances et la nation à la fois qui ont fait faillite. Et le budget soumis au Parlement n'est pas un vrai budget qui embrasse l'ensemble de la vie sociale: il n'y est question que de son équilibre; c'est un budget de circonstance; c'est de la finance pour la finance. Le problème du jour, le grand problème espagnol n'est pas envisagé par lui. D'ailleurs, on y recherche l'équilibre en ajoutant quelque chose aux recettes et en ne supprimant rien aux dépenses. On y sacrifie l'avenir au présent, et l'un et l'autre à la crainte de porter le feu et la flamme au budget des dépenses ».

Les Cortès n'approuvèrent pas un pareil budget. Le Gouvernement subit là un premier échec. Il obtint seulement quelque délai et certaines autorisations relatives à la dette, à la condition que, pendant les vacances des Chambres, il refît encore une fois ses calculs financiers.

Comment le Gouvernement tint-il sa promesse ? En présentant au mois d'octobre le budget avec quelques réductions opérées au hasard et sans obéir à aucun plan, en supprimant, par exemple, au ministère de Fomento certaines dépenses importantes alors que l'opinion publique réclamait des augmentations. En retour, les sommes énormes payées au clergé et au culte restaient intangibles, tandis que, sur la demande de M. Pidal, on supprimait des Facultés dans les Universités, et des centres d'enseignement, tels que la station biologique de Santander.

MOUVEMENT LÉGISLATIF.

V. - Ce mouvement a eu une certaine importance pendant l'année 1899. Il comprend trois ordres de manifestations distinctes 10 des projets du gouvernement manifestant des tendances politiques et législatives; 2o des mesures importantes prises par le pouvoir exécutif pour réformer les services; 30 des lois votées.

A. - Dans la première catégorie, méritent une mention spéciale les projets suivants dus à l'initiative du ministère ;

a) Le projet de loi de décentralisation administrative, dans lequel il est déclaré: 1o que les députations et municipalités auront le caractère de personnes civiles avec tous les avantages concédés par le chapitre II du Code civil, et pourront, par suite, conformément à l'article 38 de ce même Code, acquérir, posséder et aliéner les biens de toute nature; 2o que les Universités officielles auront également les mêmes droits et les mêmes facultés, conformément à la loi.

La partie restante du projet modifie sur plusieurs points la législation locale et universitaire actuellement en vigueur. Mais comme le projet n'a pas été transformé en loi, ce qui précède est suffisant pour donner une idée de ce qu'il renferme.

b) Des projets de loi d'ordre social, sur les accidents du travail des femmes et des enfants dans l'industrie, sur le repos dominical, etc. Quelquesuns de ces projets sont devenus des lois ; et il en sera parlé en temps oppor

tun.

c) Un projet de loi sur les incompatibilités parlementaires, modifiant la législation actuelle dans un sens restrictif.

d) Un projet de loi sur la suspension de l'effet des peines légères au bénėfice de ceux qui sont condamnées pour la première fois.

B. Dans la seconde catégorie, il convient de citer les dispositions suivantes :

Un décret royal du 11 février créant et organisant une junte du commerce d'exportation dans le but de « favoriser et d'encourager énergiquement la diffusion des produits espagnols partout où il sera possible de les mettre en concurrence avec les produits étrangers ».

Un décret royal du 6 mars, bien accueilli par l'opinion publique, supprimant pour l'avenir le droit reconnu à ceux qui ont été ministres de toucher une pension ou retraite de 7.500 pesetas chaque année.

Un décret royal du 29 mars réorganisant le Conseil d'Etat, à l'effet d'obtenir une économie importante, en supprimant quelques sièges de conseillers.

Un décret royal du 13 septembre réorganisant l'enseignement secondaire dans un sens rétrogade dissimulé sous l'étalage pompeux de certains principes de pédagogie moderne.

Des décrets royaux des 12 septembre et 23 octobre suspendant les garanties constitutionnelles en Biscaye et à Barcelone, pour enrayer la propagande séparatiste.

Un décret royal du 28 octobre édictant un nouveau Règlement de santé extérieur.

[blocks in formation]

La loi du 28 juin autorisant le Gouvernement à appliquer, à partir du 1er juillet, les dispositions de projets de loi du 16 juin, relative à la réorganisation et à la conversion des dettes du Trésor et de la contribution sur les utilités de la richesse mobilière. Certaines dispositions supprimaient l'amortissement de la dette amortissable et faisaient supporter à la dette de l'Etat un impôt de 20 0/0.

La loi du 24 juin autorisant le gouvernement à céder à l'Allemagne les Iles Carolines, Palaos et Mariannes. Le traité annexé à cette loi porte les clauses suivantes : 1° L'Empire allemand reconnaîtra dans lesdites îles aux ordres religieux espagnols les mêmes droits et les mêmes libertés qu'aux missions des ordres religieux allemands. 20 L'Empire allemand donnera au commerce et aux établissements agricoles espagnols dans ces îles les mêmes facilités qu'aux établissements agricoles et au commerce des sujets allemands. 3o L'Espagne pourra établir et conserver, même en temps de guerre, un dépôt de charbon pour la marine de guerre et pour la marine du commerce dans l'Archipel des Carolines, un autre dans celui des Palaos et un autre encore dans celui des Mariannes. - 4o L'Empire allemand, en compensation de la cession de ces territoires, paiera à l'Espagne une somme de 25 millions de pesetas.

La loi du 5 août fixant à 50/0 l'intérêt légal de l'argent qui, sauf stipulation contraire, est dû par le débiteur mis légitimement en demeure. L'intérêt légal était auparavant de 6 0/0.

La loi du 7 août sur la révision des procès criminels. Cette loi modifie l'article 251 § 3, du Code d'Instruction criminelle, l'article 678 du Code de Justice militaire et l'article 381 du Code d'Instruction militaire de la marine. Voici comment s'exprime cette loi. La révision peut-être demandée « lorsque quelqu'un aura été condamné en vertu d'une sentence dont le fondement sera, soit un document ou un témoignage déclarés faux dans la suite par une sentence criminelle devenue définitive, soit l'aveu de l'accusé arraché par la violence ou par tout autre fait punissable accompli par un tiers, lorsque cela résultera également d'une sentence définitive. A cet effet, on pourra administrer tous les modes de preuves qui seront reconnus nécessaires pour l'éclaircissement des faits de la cause, en mettant en premier lieu ceux qui, pour des raisons spéciales, peuvent faire défaut dans un bref délai et rendre ainsi impossible la sentence définitive, base de la révision . Dans son article 3, cette même loi accorde aux intéressés ou à leurs héritiers le droit de réclamer une indemnité, si la révision est admise et justifiée. L'article 4 déclare que les prescriptions ont un effet rétroactif.

La loi du 30 juillet sur la dette publique ayant le même objet que celle du 28 juin ci-dessus cité.

La loi du 28 novembre fixant l'année naturelle ou civile de janvier à décembre pour les services économiques de l'Etat, des provinces et des municipalités. Pour bien saisir le sens de cette loi, il faut savoir que la vie annuelle économique de l'Etat et des corps constitués locaux se comptait jusqu'ici du 1er juillet au 30 juin, année économique, disait-on.

La loi du 26 décembre disposant qu'on devraitcontinuer à s'appliquer les

prescriptions du budget de 1898-1899 en tenant compte des réductions adoptées par les deux Chambres à propos du budget du Gouvernement pour 1900. C'est là une loi de circonstance due aux difficultés rencontrées par le ministère pour faire voter son budget.

Une autre loi portant la même date et autorisant le ministre des finances à passer avec la Banque d'Espagne une convention relative aux services de trésorerie de l'Etat loi très importante parce qu'elle règle les rapports du Trésor et de sa Banque.

Une autre loi de la même date autorisant le Ministre des finances, dans un but purement fiscal, à augmenter ou à réduire les droits d'importation à percevoir sur certaines marchandises déterminées, à reviser les dispositions de notre régime douanier actuel. Cette même loi assujettit au paiement des droits les produits et ouvrages manufacturés provenant de Fernando-Po, de Rio de Oro et des autres possessions espagnoles de l'Afri

que.

Une autre, enfin, de la même date encore, modifiant l'article de la loi du 19 octobre 1869 sur la frappe des monnaies d'or et fixant le poids, le titre et le diamètre de celles qu'il y aura lieu de fabriquer.

En dernier lieu, pour compléter cet exposé des dispositions émanées des pouvoirs du Gouvernement de l'Espagne, nous citerons la publication, effectuée le 11 avril, du traité de paix intervenu entre l'Espagne et les Etats-Unis et celle, en date du 25 mai, de la convention sur la procédure civile adoptée par l'Espagne, la France, la Belgique, l'Italie, les Pays-Bas et autres nations. La convention a pour objet la communication des documents judiciaires ou extrajudiciaires, la caution « judicatum solvi », l'administration de la justice gratuite, la contrainte par corps, etc.

(Traduit par M. J. Gaure, Avocat).

ADOLFO POSADA,

Professeur à l'Université d'Oviédo.

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

Le 20 septembre 1898, la jeune reine, pour la première fois de sa vie, ouvrait en personne la session des Etats-Généraux: le 31 août 1898, elle avait accompli sa 18e année; par ce fait seul, qui faisait cesser la régence de sa mère, elle était de droit reine régnante et, le 6 septembre, le «Juhuldiging (sacre ou couronnement) avait lieu (1). L'ouverture de la séance était donc un de ses premiers actes de gouvernement, cependant son discours du trône ne contient rien de particulièrement remarquable. Aussi nous allons nous occuper, tout de suite, des autres évènements de l'année politique.

1. CONFÉRENCE DE LA PAIX. La conférence de la Haye, dite de la paix, a réellement enthousiasmé beaucoup de gens. Pourtant elle n'était que la simple continuation de la Conférence de Bruxelles de 1874: à cette époque aussi l'Empereur de Russie avait pris l'initiative; elle aurait dû être suivie d'une seconde conférence à Saint-Pétersbourg, qui n'a pas eu lieu. Les Anglais et les événements qui ont troublé la Russie en ont été la cause. Cependant le travail de la codification du droit de la guerre a été repris. Il ne faut pas se faire illusion. La guerre n'a pas été abolie et elle ne saurait l'être. Pourtant des progrès sérieux ont été réalisés.

Ce qui a douloureusement ému tous les cœurs vraiment néerlandais, c'est que la République Sud-Africaine et l'Etat libre d'Orange n'ont pas été invités. Le dernier Etat étant complètement libre et indépendant ne pou vait être omis sous aucun prétexte, et la convention de 1884 entre la Grande-Bretagne et la République Sud-Africaine ne limitait la souveraineté de cette République qu'en donnant à l'Angleterre un droit de contrôle sur ses relations extérieures. On pouvait donc dire que la République Sud-Africaine ne comptait que parmi les Etats mi-souverains; mais, si cela était une raison, pourquoi la Bulgarie a-t-elle été invitée ? On a dit aussi que la Conférence n'était destinée qu'aux Etats européens; cependant le Siam, le Japon et les Etats-Unis du Mexique ont envoyé leurs délégués, de sorte qu'il faut bien croire qu'une trop grande complaisance envers l'une des grandes puissances a inspiré les actes du gouvernement néerlandais. Il aurait mieux valu décliner le très grand honneur de recevoir la Conférence à La Haye que manquer de caractère et de sens national: une digne

(1) V. le n° de novembre-décembre 1898, p. 551.

« PreviousContinue »