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I. TELLIAS, poète et devin | nal Mazarin, qui le proposa au roi de l'Elide dans le Péloponèse, Louis XIII pour remplir la place suggéra un stratagème nouveau de secrétaire d'état. Les divisions aux Phocéens, lorsqu'ils faisoient qui déchiroient la France après la guerre aux Thessaliens. Il leur la mort de ce prince lui donconseilla de choisir six cents hom- nèrent lieu de signaler son zèle mes des plus vaillans, de blan- pour l'état. Tout ce qui fut néchir leurs habits et leurs armes gocié avec le duc d'Orléans avec du plâtre, et de les envoyer et avec M. le prince passa par vers la nuit dans le camp des ses mains. Il eut la plus grande Thessaliens, leur ordonnant de part au traité de Ruel; et ce fut tuer tous ceux qui ne leur paroî-à lui que la reine régente et le troient pas blancs. Cet artifice cardinal Mazarin donnèrent leur réussit ; les Thessaliens, épouvan-principale confiance après les tés par un spectacle si extraordi- brouilleries dont la France fut naire ne firent aucune résistance agitée depuis ce traité. Le parti et eurent 3000 hommes tués sur des factieux ayant prévalu en la place. 1651, Mazarin se retira, et fut bientôt rappelé. Pendant l'absence du cardinal, LeTellier fut chargé des soins du ministère, que la situation des affaires rendoit trèsépineux. Après la mort de ce ministre, il continua d'exercer la charge de secrétaire d'état jusrement au marquis de Louvois, qu'en 1666, qu'il la remit entièil donna un habit à chacun d'eux. Athénée, qui nous a fait connoi-vivance. Sa demission volontaire son fils aîné, qui en avoit la surtre cet homme bienfaisant, ne dit pas en quel temps il vivoit.

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II. TELLIAS, d'Agrigente, a immortalisé son nom par une libéralité presque incroyable. La porte de sa maison étoit toujours ouverte aux étrangers, et on n'en refusoit l'entrée à personne. Il reçut un jour en hiver 500 cavaliers, et les voyant mal vêtus,

*I. TELLIER (N. le), médecin bordelais, qui vivoit dans le 17 siècle, a écrit un ouvrage curieux sur l'état des malades, intulé Quæstio medica de ægri natura, Bordeaux, 1635, in-4°.

† II. TELLIER (Michelle), fils d'un conseiller à la cour des aides, et petit-fils d'un correcteur des comptes, naquit à Paris le 19 avril 1603. Son premier emploi dans la robe fut celui de conseiller au grand-conseil, qu'il quitta en 1631, pour exercer la charge de procureur du roi au châtelet de Paris. De ce poste il passa à celui de maître des requêtes. Nonimé intendant de Piéniont en 1640, il gagua les bonnes graces du cardi

ne l'éloigna pas du conseil. En 1677 il fut élevé à dignité de chancelier et de garde des sceaux. Son grand âge ne diminua rien de son zèle vigilant et actif. Ce zèle ne fut pas toujours prudent: il fut un des principaux moteurs de la révocation de l'édit de Nantes, qui fut accompagnée de tant de cruautés. Il s'écria en signant cet édit: Nunc dimittis servum tuum, Domine, quia viderunt oculi mei salutare tuum. Le Tellier, en croyant faire son salut ne fit pas celui de la France. Louis XIV vouloit porter les protestans à changer de religion; il y seroit parvenu vraisemblablement en n'usant à leur égard d'aucune violence, en laissant l'édit dans une espèce d'oubli. L'esprit de révolte avoit cessé depuis la paix

nes, et qu'il abusa souvent de la confiance du roi pour obtenir des places à des amis sans mérite, ou pour perdre d'illustres ennemis. Dans sa vie privée, il fut simple et austère ; et il cachoit, sous les dehors de la modestie, la finesse de sa politique, l'inflexibilité de son caractère, et sou penchant au despotisme. Son habileté dans les affaires fut le premier fondement de la grandeur de sa famille, que le marquis de Louvois son fils accrut encore.

de Nîmes. Les religionnaires contribuoient à la prospérité du royaume par leur industrie, par l'activité dans le commerce, par leurs services à la guerre. Les grands étoient soumis, le gouvernement absolu; et la secte sans chef, sans appui, éloignée des honneurs, et des places d'honneur et de confiance, auroit infailliblement péri d'elle-même. On la fit, pour ainsi dire, renaître de ses cendres en irritant le zèle du monarque contre un édit solennel dont il avoit jaré l'observation à son sacre et que + III. TELLIER (Françoisle grand Colbert regardoit comme Michel le), marquis de Louvois, très- utile aux arts et au com- fils du précédent, naquit à Paris merce. A peine eut-on frappé ce le 18 janvier 1641. Le chancelier, coup, qu'on en sentit le danger son père, le proposa à Louis XIV par la fuite d'une foule de sujets comme un jeune homme d'un bon mdustrieux et fideles; par la ter- esprit, quoiqu'un peu lent, mais reur des lois pénales qui en furent qui, aidé des avis de son prince, la suite; par les guerres qui épui- seroit bientôt propre à l'adminissèrent l'état et amenèrent des re- tration. Louis, flatté d'être créavers. Dans un cas semblable, teur, donna des leçons à LouThéodose - le Grand retira ses vois qui les recevoit en novice. édits, et l'arianisme, laissé dans Ses progrès furent rapides. Il fut l'oubli ou dans le mépris, s'étei- revêtu en survivance de la charge gnit insensiblement. C'est ce que de ministre de la guerre, dit l'auteur impartial d'un Essai 1664. Le roi s'étant persuadé que sur le Languedoc depuis les Ro- c'étoit lui qui faisoit tout sous un mains jusqu'à notre siècle. Le ministre qu'il avoit formé, le miTellier ne pensoit pas comme lui. nistre fit bientôt faire tout ce qu'il Il mourut peu de jours après, le vouloit lui-même. Il devint maître 28 octobre 1685. Bossuet pronon- absolu du militaire, et assujettit ça son oraison funèbre ; le chan- les généraux à lui rendre compte celier y paroît un juste et un directement. Tous, à l'exception grand homme. Mais si l'on con- de Turenne, s'y soumirent. Son sulte les Annales de l'abbé de activité, son application et sa viSaint-Pierre, c'est un lâche et gilance lui procurerent tous les dangereux courtisan, un calom-jours de nouvelles faveurs. Nomniateur adroit, dont le comte de Grammont disoit en le voyant sortir d'un entretien particulier avec le roi : « Je crois voir une fouine qui vient d'égorger des poulets, et qui se lèche le museau teint de leur sang. » Il est certain que ce ministre étoit extrême dans ses amitiés et dans ses hai

en

mé surintendant général des postes en 1668, chancelier des or dres du roi, grand-vicaire des ordres de Saint-Lazare et de MontCarmel, il renmplit ces différentes places en homme supérieur. Un grand nombre d'hôpitaux démembrés de l'ordre de Saint-Lazare, y furent réunis, et destinés

ministre n'en fut pas content.
Monsieur, lui dit-il publique-
ment, votre compagnie est en
fort mauvais état. Monsieur
je ne le savois pas. - Il faut le
savoir. L'avez-vous vue? Non,
monsieur; j'y donnerai ordre.

le

en 1680 à former cinq grands prieurés et plusieurs commanderies, dont le roi gratifia près de 200 officiers estropiés ou vétéraus. Les soldats que les disgraces de la guerre mettoient hors d'état de servir obtinrent leur retraite honorable dans l'Hôtel des Inva- Il faudroit l'avoir donné.... Il lides bâti par les soins du mar- faut prendre parti, monsieur; ou quis de Louvois. Son zèle pour se déclarer courtisan, ou s'acquitl'éducation de la noblesse lui fit ter de son devoir quand on est, encore obtenir de sa majesté officier. Le marquis de Saintl'institution de quelques acadé- André sollicitoit un petit gouvermies dans les places frontières nement. Louvois, qui avoit reçu du royaume, où grand nombre quelques plaintes contre lui, de jeunes gentilshommes élevés refusa. Si je commençois à servir, gratuitement apprenoient le mé- je sais bien ce que je ferois, rétier de la guerre. Après la mort partit cet officier en colère. - Et de Colbert arrivée en 1683, il fut que feriez-vous, lui demanda le pourvu de la charge de surinten- ministre d'un ton brusque ? dant des bâtimens, arts et manu- Je réglerois si bien ma conduite, factures de France. L'étendue de que vous n'y trouveriez rien à reson génie l'élevoit au dessus dire. Il n'y eut que cette saillie de cette multitude d'emplois qu'il inattendue qui put l'engager à acexerça toujours par lui-même; corder ce que Saint-André lui mais ses grands talens éclaterent demandoit. L'artillerie, dont sur-tout dans les affaires de la il exerça lui-même plus d'une guerre. Il introduisit le premier fois la charge de grand-maître cette méthode avantageuse, que fut servie avec plus d'exactitude la foiblesse du gouvernement que jamais; et des magasins étaavoit jusqu'alors rendue imprati-blis par ses conseils dans toutes cable, de faire subsister les ar- les places de guerre furent fourmées par magasins. Quelques sié-nis d'une quantité prodigieuse ges que le roi voulût faire, de d'armes et de munitious entrequelque côté qu'il tournât ses ar- tenues et conservées avec le dermes, les secours en tout genre nier soin. Dans ce grand nombre étoient prêts, les logemens des de fortifications que le roi fit troupes marqués, leurs marches élever et réparer pendant son réglées. La discipline rendue plus ministère on n'entendoit plus sévère de jour en jour par l'aus-parler de malversations. Les plans térité inflexible du ministre enchaînoit tous les officiers à leur devoir. Il avoit si bien banni la mollesse de l'armée française, qu'un officier ayant paru à une alerte en robe-de-chambre, son général la fit brûler à la tête du camp comme une superfluité indigne d'un homme de guerre. Un seigneur (Nogaret) avoit levé une nouvelle troupe; le sévère

de mieux concerté

les ré

étoient levés avec toute l'exacti-
tude possible, et les marchés exé-
cutés avec une entière fidélité.
D'ailleurs rien de plus juste et
que
glemens publiés pour les étapes,
pour les marches, pour les quar-
tiers et pour le détail des troupes.
La paye des officiers et des sol-
dats étoit constamment assurée
par
des fonds toujours prêts, qui

tère hautain avoient indisposé tout le monde contre lui. Avant

suivolent et devançoient les armées. La force de son génie et le succès de ses plus hardies en-lui les secrétaires d'état donnoient

la

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treprises lui acquirent un ascen- du monseigneur aux ducs en leur dant extrême sur l'esprit de écrivant; Louvois supprima ce Louis XIV; mais il abusa de titre. Il fit plus il l'exigea pour sa faveur. Pendant le siége de lui-même de tous ceux qui ne le Mons, il déplaçoit les gardes que lui donnoient pas auparavant. De le roi avoit placées, et ce prince bons officiers furent obligés de se bornoit à dire «N'admirez-quitter le service, parce qu'ils ne vous pas Louvois, il croit savoir voulurent pas se soumettre à cette guerre mieux que moi. Il loi. Les philosophes devoient être osoit même quelquefois traiter ce encore plus mécontens de lui que prince avec une hauteur qui le les courtisans: ils pouvoient lui rendit odieux. Au sortir d'un con- reprocher les cruautés, les ravaseil où le roi l'avoit très mal ges exercés dans le Palatinat en reça, il rentra dans son appar-1689; le projet d'exciter le duc de lement, et expira. C'est ainsi Savoie et les Suisses à déclarer la que mourut ce fondateur du des-guerre à la France, en manquant potisme des ministres, consumé à tous les traités faits avec eux. par l'ambition, la douleur et le « Louvois, dit Duclos, jaloux des chagrin, le 16 juillet 1691. La succès et du crédit de Colbert, manière dont madame de Sévigné excite la guerre dont il a le déannonça cette mort à Coulanges partement. Il persuade au roi de peut beaucoup servir à nous faire s'emparer de la Franche-Comté, connoître ce que les contempo- des Pays-Bas espagnols, au mépris raiens pensoient, et ce que la des renonciations les plus solenpostérité doit penser de Louvois. nelles. Cette guerre en amène Le voilà donc mort, ce grand successivement d'autres que Louministre, cet homme si considé-vois avoit le malheureux talent de rable, qui tenoit une si grande place, dont le moi (comme dit M. Nicole) étoit si étendu; qui étoit le centre de tant de choses. Que d'affaires, que de desseins, que de projets, que de secrets, que d'intérêts à démêler! Que de guerres commencées, que d'intrigues, que de beaux coups d'échec à faire et à conduire! Ah, mon Dieu! donnez-moi un peu de temps; je voudrois bien donner un échec au duc de Savoie, un mat au prince d'Orange. Non, non, vous n'aurez pas un seul moment. Faut-il raisonner sur cette étrange aventure? Non, en vérité. Il y faut réfléchir dans son cabinet...>> Louvois ne fut regretté par le roi, ni par ses courtisans. Son esprit dur, son carac

ni

perpétuer. Celle de 1688 dut sa
naissance à un dépit de l'orgueil-
leux ministre. Le roi faisoit bâtir
Trianon; Louvois, qui avoit suc-
cédé à Colbert dans la surinten-
dance des bâtimens, suivoit le roi
qui s'amusoit dans ces travaux.
Ce prince s'aperçut qu'une fenêtre
n'avoit pas autant d'ouverture que
les autres, et le dit à Louvois: ce-
lui-ci n'en convint pas, et s'opi-
niâtra contre le roi qui insistoit,
et qui traita durement Louvois de-
vant les ouvriers. Aman humilié
rentra chez lui la rage dans le
cœur; et là, exhalant sa fureur.
devant ses familiers: « Je suis
perdu, s'écria-t-il, si je ne donne
de l'occupation à un homme qui
s'emporte sur des misères. Il n'y
a que la guerre pour le tirer de

mérite qui pouvoit briller sans son appui, il faisoit épier les généraux jusque dans leurs moindres démarches, les opposoit avec art les uns aux autres pour les soumettre plus sûrement à sa domination, et ne récompensoit leurs services qu'en raison de leur dévouement à ses volontés. Après que le funeste ascendant de ses conseils eut entraîné Louis XIV dans des guerres continuelles, il ne lui restoit plus, pour achever la dépopulation et la ruine de la France, que d'armer ce prince

ses bâtimens; et -parbleu il en aura, puisqu'il en faut à lui ou à moi. » La ligue d'Augsbourg qui se formoit pouvoit être désunie par des mesures politiques: Louvois souffla le feu qu'il pouvoit éteindre, et l'Europe fut embrasée parce qu'une fenêtre étoit trop large ou trop étroite. Voilà les grands événemens par les petites causes. » Il pensoit faussement qu'il falloit faire une guerre cruelle, si l'on vouloit éviter les représailles. Le seul moyen de faire cesser les incendies et les cruautés étoit, selon lui, d'en-contre son propre peuple; et c'est chérir sur celui qui commençoit. Aussi écrivoit-il au maréchal de Boufflers « Si l'ennemi brûle un village de votre gouvernement, brûlez-en dix du sien. » En 1675 il avoit déjà fait incendier une partie du Palatinat; en 1689 il résolut de nouveau de faire un désert de ce beau pays: son ordre portoit de tout réduire en cendres, » et il ne tint pas à lui que cet ordre, qui couvroit d'opprobre Louis XIV et le nom français, ne fût exécuté dans toute sa rigueur. La docilité apparente et la souplesse de Louvois avoient jeté les premiers fondemens de sa puissance; ses talens et ses succès la portèrent au comble. «< Sans être précisément premier ministre, dit Saint-Simon, il abattit tous les autres, sut mener le roi comme il le voulut, et fut en effet le maître. » En étendant presque sans limites l'autorité des secréteires d'état, en leur attribuant des prérogatives et des honneurs jusqu'alors inconnus, il fut le fondateur du despotisme ministériel. Malheur à qui voulut se soustraire à celui de Louvois! Ne pas rechercher sa protection étoit déjà un moyen sûr de s'attirer son inimitié. Jaloux de tout crédit qui me dérivoit pas du sien, de tout

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ce qu'il fit. Colbert avoit protégé les réformés comme des sujets utiles; ce fut assez pour que Louvois voulut les perdre comme des rebelles. Son père s'unit à lui pour l'exécution de ce funeste dessein; et Louis XIV, qui prétendoit régner jusque sur les consciences et qui croyoit extirper l'hérésie en envoyant des dragons contre les hérétiques, signa, en 1685, la révocation de l'édit de Nantes. Louvois fut le digne exécuteur de cet acte de proscription; on le reconnoît dans ces lignes atroces adressées aux gouverneurs des provinces : « Sa majesté veut qu'on fasse éprouver les dernières rigueurs à ceux qui ne voudront pas être de sa religion. » Cinq cent mille protestans sortirent de France, malgré les précautions que l'on avoit prises pour prévenir leur émigration; et ce fut sur-tout ceux à qui l'industrie assuroit de quoi vivre partout si tous eussent pu fuir, le roi perdoit plus de deux millions de sujets. Louvois avoit empêché Louis XIV de déclarer son mariage avec madame de Maintenon. Cet acte de courage, en le rendant odieux à la favorite, donna la première atteinte à son crédit. Le roi, qui l'avoit toujours plus esti

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