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cent trente-six blancs, quatre cent quarante-six nègres libres, quatorze mille neuf cent soixante-sept noirs esclaves, et environ trente familles de Caraïbes indigènes. Bryan Edwards nous dépeint ceux-ci comme des gens tranquilles et doux, vivant principalement de la pêche et de la chasse. Il confirme ce qu'il avoit observé sur les Caraïbes en général, relativement à leur adresse à tirer de l'arc, et à leur habileté dans la manière de faire les paniers de paille et d'écorce d'arbres.

En 1787, il sortit de la Dominique cent soixante et deux vaisseaux, montés de dix-huit cent quatorze hommes d'équipage : les cargaisons en étoient évaluées à la somme de sept millions deux cent soixante et onze mille sept cent cinq livres cinq sols tournois.

ISLE DE SAINT-CHRISTOPHE.

Cette île, découverte par Christophe Colomb, et honorée de son nom, n'a jamais été cultivée par les Espagnols. Long-temps elle fut concurremment occupée par les Français et les Anglais : mais elle fut cédée à ceux-ci par le traité de Breda. Après en avoir été chassés pendant la guerre, y furent rétablis le traité d'Utrecht. Ils la perdirent de nouveau en 1782, mais elle leur fut restituée en 1783.

ils

par

Cette île contient environ quarante-trois mille sept cent vingt-six acres de terre, dont vingt et un mille environ sont en pâturages et en plantations de cannes à sucre. L'intérieur du pays est montueux et aride; mais la fertilité des plaines qui s'étendent le long des rivages, dédommage de la stérilité des montagnes. Le sol de Saint-Christophe n'a rien de commun avec celui des autres îles : poreux et léger, c'est un mélange de terre vierge et d'une pierre ponce ferrugineuse. Des feux souterrains lui ont probablement donné cette qualité. Du reste, ce sol n'a point son pareil pour la production du sucre. Les terres choisies de Saint-Christophe rapportent année commune trente-deux

quintaux de sucre par acre (3584 livres, à 112 pesant le quintal); et dans certains endroits, on a vu des cannes produire la quantité prodigieuse de huit mille livres de sucre par acre.

Saint-Christophe renferme neuf paroisses. Basse-Terre en est la capitale. Le nombre des habitans est évalué à quatre mille blancs, vingt-six mille nègres esclaves, trois cent nègres libres et mulâtres.

ISLE DE NEVIS.

L'ile de Nevis s'élève du milieu de la mer en forme de montagne, dont la base n'a pas plus de huit lieues. Toute la surface et l'aspect de l'île annoncent qu'elle fut produite à quelque époque reculée, par l'explosion d'un volcan. Le sommet de la montagne forme un cratère qui renferme une source d'eau chaude fort imprégnée de soufre. Il est très-probable que lorsque l'île fut découverte par Colomb, il sortoit de la fumée de ce cratère au milieu des neiges, et que celte circonstance fit donner à l'île le nom de Nieves, neiges, d'où les Anglais l'ont nommée Nevis.

Quoique cette île en général soit bien arrosée et son sol extrêmement fertile, ce sol, dans quelques endroits, est fort sec; mais, par cela même, ces parties sont propres à produire en abondance des ignames et d'autres légumes qui ne viendroient peut-être pas aussi bien dans un terrein plus humide. On compte dans l'île six cents blancs et dix mille nègres.

ISLES D'ANTIGUE, DE MONTSERAT, DE BAHAMA ET DES VIERGES.

Bryan Edwards s'est borné à nous donner la population des îles d'Antigue, de Montserat, de Bahama et des Vierges. Antigne contient deux mille cinq cent quatrevingt-dix blancs, et trente-sept mille huit cent huit

nègres; Montserat, treize cents blancs et dix mille nègres; les îles Bahama, mille soixante blancs et deux mille deux cent quarante et un nègres; les Vierges, douze cents blancs et neuf mille nègres.

A la suite de ces descriptions, Bryan Edwards trace le caractère des Européens résidens aux îles Antilles anglaises, celui des créoles, de leurs femmes et de leurs enfans, avec quelques observations sur les effets du climat à leur égard. Sous les mêmes rapports, il considère les nègres libres et les mulâtres.

Mais il s'étend beaucoup plus sur les noirs dans l'état d'esclavage. Non- seulement il donne l'historique de la traite à la côte d'Afrique, mais il entre dans de grands détails sur l'importation des nègres dans les colonies par les différentes nations de l'Europe. A ces calculs commerciaux, il fait succéder le tableau des différentes peuplades africaines qui sont l'objet de la traite. Il y fait entrer les traits qui les distinguent par leurs bonnes ou mauvaises qualités, soit dans leur terre natale, soit dans l'état d'esclavage. Après avoir exposé les moyens qu'on emploie pour se procurer des esclaves sur les différentes côles d'Afrique, la méthode à laquelle on s'attache pour le transport de ceux qui sont destinés aux îles anglaises, les réglemens nouvellement établis à cet égard par un acte du parlement, les effets de ces réglemens, le mode des ventes des noirs à leur arrivée dans les colonies, l'emploi qu'on en fait, la manière dont on les traite, la disproportion de sexe chez les nègres actuellement importés d'Afrique, les causes de leur diminution actuelle, entre lesquelles Bryan Edwards range la polygamie, il fait observer que l'esclavage même le plus doux est contraire à la population, et propose divers moyens pour améliorer encore le sort des esclaves. Ces dispositions philanthropiques ne l'amènent pas néanmoins à voter indéfiniment pour que la traite soit abolie: il rassemble au contraire les objections qu'il y a lieu de faire contre une abolition directe et immédiate de ce commerce par la nation bri

tannique seule : il fait valoir avec force plusieurs considérations sur les conséquences d'une pareille mesure.

Le cinquième livre de l'ouvrage de Bryan Edwards est consacré au tableau des diverses cultures qui ont lieu dans les Antilles. Le sixième livre roule sur la forme de gouvernement des établissemens coloniaux anglais, et sur les divers genres de commerce auxquels les productions de ces établissemens donnent lieu. Des détails très-instructifs, et des vues pleines de sagacité distinguent cette partie de l'ouvrage; mais il ne seroit pas possible d'en donner un extrait satisfaisant, parce qu'il n'y a rien à en retrancher ; il faut les lire en entier dans l'ouvrage même.

Bryan Edwards l'a terminé par un tableau rapide de l'état politique de la colonie de Saint-Domingue avant 1786, et par la relation des événemens malheureux qui sont arrivés dans cette colonie jusqu'à la fin de 1794. Le traducteur l'a continuée jusqu'à l'époque de la mort du Capitaine-général Le Clerc.

S. II. Descriptions des Grandes-Antilles. Voyages faits dans ces îles.

JE ne connois point de relations particulières à l'île de Cuba, la plus considérable, sinon par sa culture, au moins par son étendue, des grandes îles Antilles; mais comme c'est un lieu de relâche pour les flottes espagnoles qui vont dans les Indes occidentales, ou qui en reviennent, et même pour beaucoup de vaisseaux des autres nations, on trouve des renseignemens sur cette île dans plusieurs Voyages. C'est principalement dans les Mémoires de Fischer, écrits en allemand, rédigés en grande partie, pour ce qui concerne les colonies espagnoles, d'après le Voyageur universel espagnol, et dont j'ai donné précédemment un extrait (cinquième Partie, section 1) qu'on peut, ainsi qu'on l'a vu, se faire une idée de l'île de Cuba.

Comme pour cette île, ce n'est également que dans des

relations communes à d'autres pays qu'on peut se procurer des notions sur l'île de Porto-Rico, l'une aussi des Grandes → Antilles. J'en ai donné une esquisse dans la notice des Voyages intéressans (ibid.). Quant à Saint-Domingue et à la Jamaïque, on a sur ces deux îles plusieurs relations particulières,

SAINT-DOMINGUE,

HISTOIRE de l'Isle-Espagnole ou de Saint-Domingue, écrite particulièrement sur les Mémoires manuscrits du P. J. B. Pers, missionnaire, et sur les pièces originales qui se conservent au dépôt de la marine, par le P. Charlevoix, jésuite, enrichie de plusieurs cartes géographiques et de vignettes, Paris, Prulard, 1722, 2 vol. in-4°.

La même. Amsterdam, 1733, 4 vol. in-12. Ainsi que l'annonce le titre, cette relation a été composée, en grande partie, d'après les Mémoires d'un missionnaire; mais le P. Charlevoix en a judicieusement retranché les détails purement relatifs aux travaux des missions; et il n'a traité que l'histoire politique, militaire et morale de l'île, le meilleur ouvrage peut-être de cet écrivain, qui l'a divisé en douze livres : c'est dans le douzième qu'il décrit les deux parties de l'île soumises à l'Espagne et à la France. La partie espagnole spécialement ne nous éloit guère connue que par sa relation, avant la description plus détaillée qu'en a publiée assez récemment M. Moreau de Saint-Méry. Le P. Charlevoix indique les principaux établissemens formés par les Espagnols dans la partie de l'île qu'ils occupoient sur-tout il s'étend beaucoup sur la riche plaine de San-Domingo et sur la capitale qui lui a donné ce nom. L'ignorance, la fierté des Espagnols, la pauvreté qui marche à la suite de leur indolence, quelques vertus qui forment un contre-poids à ces vices, telles que la tempérance et la générosité, sont

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