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île est remplie de sources d'eau ; mais qui est nécessaire pour les endroits qui n'en ont pas ou qui en sont très-éloignés.

«

<< Le pays, dit-il, où j'ai mis mes abeilles, ainsi que bien d'autres, n'est pas abondant en eaux, à beaucoup près; et comme elle leur est absolument nécessaire, voici comment j'y supplée. J'ai un baquet large, et bas de bords; j'en couvre le fond de la mousse qui croît sur les arbres, et je mets de l'eau par-dessus, de façon qu'elle ne surmonte pas la mousse.

l'on

« Cette manière de donner à boire aux abeilles, outre les longs voyages qu'elle leur épargne et le danger de se noyer dont elle les préserve, paroît leur être fort agréable, ce que je juge à la quantité considérahle de mouches que voit venir s'y désaltérer, et à la consommation de l'eau qui va à deux pintes par jour pour dix ruches (1). Au lieu qu'on voit à peine quelques mouches venir où il n'y a que de l'eau avec

(1) Quoiqu'il en soit de la prédilection des abeilles pour la mousse sur la paille, que je crois très-probable, il est certain que la pratique de M. Lagrenée ne peut qu'être très-utile pour les abeilles. Pour ce qu'il dit ensuite, qu'il faut deux pintes d'eau par jour pour dix

des brins de paille par dessus, comme quelques personnes le pratiquent.

«Pour n'être pas dans le cas de mettre de l'eau si souvent, je prends une douve de tonneau; je choisis celle qui est percée pour la bonde, je l'appuie des deux bouts sur les bords du baquet, et l'y cloue, s'il le faut; puis je mets dans le trou une bouteille de grès pleine d'eau, renversée le cou en bas. L'eau du baquet soutient celle de la bouteille, laquelle ne se vide qu'à mesure que l'eau du baquet est enlevée. Il faut le cou de la bouteille ne soit ni trop long, ni trop court, afin que l'eau du baquet ne soit ni trop basse, ni trop haute.

que

« Cette pratique doit être mise en usage, seulement au printems et dans les sécheresses; elle est très-utile pour faire prospérer les abeilles: on renouvelle la mousse de temps à autre, lorsqu'on voit qu'elle se dissout. » Cette observation de M. Lagrenée prouve l'eau n'est nécessaire aux abeilles que pour

que

ruches, on doit l'entendre pour le temps des grandes couvées. Au reste, outre ces dix ruches, à combien d'autres des environs ne servent pas ces deux pintes d'eau ?

leurs couvains, c'est-à-dire au printemps, lors des grandes couvées; ce qui confirme notre sentiment sur la destination de l'eau dans les ruches.

CHAPITRE X.

De la fausse teigne qui détruit les rayons des abeilles.

LORSQUE

ORSQUE tous les auteurs s'accordent à mettre la fausse teigne au nombre des ennemis de nos insectes, c'est parce qu'en détruisant leurs rayons, et en dévastant leur demeure et leurs provisions, elles les forcent à périr ou à abandonner leur ruche. La teigne n'est pas particulièrement l'ennemie des abeilles; elle ne les attaque jamais ; mais elle détruit leurs rayons pour y faire ses galeries, son habitation, et se nourrir des matières hétérogènes qui s'y trouvent, comme des dépouilles des nymphes, et de la molividhe. J'en parlerai, après avoir donné une description exacte de cet insecte, tirée du Dictionnaire de M. de Bomare.

« Les abeilles, dit-il, ont encore (il venoit

de parler des autres ennemis des abeilles ) un ennemi bien plus dangereux; car ce n'est pas seulement aux abeilles, qu'ils font tort, en détruisant, mangeant et bouleversant leurs travaux, mais encore à nous-mêmes (1); qu'il prive de l'espérance de partager avec elles un bien que nous regardons comme commun entre elles et nous.

« Cet ennemi aussi dangereux, est un insecte, que l'on appelle teigne de cire à cause du dégât qu'il en fait. C'est une petite chenille tendre et délicate, sans armes et sans défense, qui sait vivre aux dépens des travaux de plus de dix huit mille ennemis, tous bien armés, dont elle est environnée continuellement, et qui tous veillent à la garde de leur trésor.

Notre mangeuse de cire (on a vu que la teigne ne mange point la cire) est du genre des fausses teignes. Son papillon est du genre des phalènes; c'est-à-dire de ceux qui ne volent que la nuit. Ce papillon, ami de l'obscurité, profite de la nuit où tous les êtres de la na

(1) Quoique la teigne ne mange ni le miel ni la cire, elle ne laisse pas d'occasionner la diminution de l'un et de l'autre par le dégât qu'elle fait des rayons, et parce qu'elle retarde les abeilles dans leur travail.

ture sont livrés au sommeil; il trouve le moyen de s'insinuer dans une ruche, de tromper la vigilance des abeilles, de traverser une armée formidable, pour aller déposer ses œufs dans le coin de quelque gâteau. Au bout de quelques jours, l'œuf éclôt ; il en sort une petite chenille à seize jambes, rase, dont la peau est blanchâtre, la tête brune et écailleuse. Cette chenille, qui naît environnée d'ennemis prompts à la vengeance, ne peut éviter la mort, que par son extrême petitesse, qui dérobe les premiers momens de sa naissance aux regards des surveillans (1), et par la promptitude avec laquelle elle file dans l'instant, et s'enferme dans

(1) Ce n'est pas la petitesse des teignes qui les fait échapper à la mort; c'est parce qu'elles naissent parmi la molividhe dans les alvéoles qui en sont à moitié pleines, ou dans les fentes des ruches dont celles de paille

Ou

d'osier sont remplies, ou enfin parmi les ordures, et sur-tout lorsqu'on ne nettoie les ruches qu'une ou deux fois par an. Cependant lorsque la ruche est forte et bien peuplée, aussitôt que les teignes commencent à attaquer les rayons, les abeilles les tuent et les jettent hors de leur ruche, ce que l'on voit souvent mais si elle est foible, les vers se multiplient si rapidement que les abeilles n'osent plus les attaquer, ou ne le font que foiblement.

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