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(on peut voir ce que j'ai rapporté de M. Lagrenée, dans les quatre derniers chapitres du premier livre) << pour passer l'hiver, ne sont pas

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sujets à être malades; et si on leur laisse l'air « libre tout autour par le bas, on est sûr que les abeilles y seront délivrées des deux fléaux qui «<leur sont les plus funestes, je veux dire la << disette de vivres et le défaut d'air

pur.. » Je conviens qu'il est difficile de connoître la nature de plusieurs maladies des abeilles, et leur cause; dès-lors ce ne sera pas sans difficulté qu'on pourra trouver le moyen de les guérir. Mais ne doit-il pas suffire que la chose ne soit pas impossible, pour encourager les cultivateurs à faire en sorte d'y parvenir à force d'expériences, et à imiter les efforts de ceux qui ont réussi à prolonger la conservation des autres animaux utiles? Je sais qu'un cultivateur qui possède une certaine quantité de ruches, feroit mieux de se délivrer tout d'un coup de celles qui ne donnent pas grand espoir; mais celui qui en a peu, et qui voudroit en tirer des essaims pour former un rucher proportionné à sa propriété, auroit besoin de trouver des moyens pour conserver ses ruches foibles, ou celles qui sont malades. Je crois qu'en suivant exactement les conseils que

Tome III.

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les meilleurs auteurs ont donnés à ce sujet,

on viendroit à bout de sauver ses abeilles. Si

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M. Lagrenée se flatte que les cultivateurs, en observant les règles qu'il leur donne sur gouvernement des abeilles, en retireront de grands avantages pour leur conservation, je crois pou voir espérer aussi que les amateurs, en pratiquant ce que j'ai prescrit pour les bien conduire pendant toute l'année, et sur-tout pendant l'hiver, les délivreront des deux fléaux les plus redoutables, la disette de vivres et la corruption de l'air. Non-seulement leurs ruches se maintiendront saines et vigoureuses pendant dix, quinze et vingt ans, mais elles se multiplieront à un tel excès, qu'ils ne sauront qu'en faire. La principale maladie, et la plus connue de celles auxquelles les abeilles sont sujettes, c'est le flux de ventre ou dévoiement, qui, surtout au printemps, attaque les plus foibles et les plus mal constituées.

Cette maladie est contagieuse, et elle fait périr quelquefois une ruche entière. Voici com ment elle se communique, d'après M. Ducarne. Dans l'état naturel, il n'arrive pas que les excrémens des abeilles, qui sont toujours liquides, tombent sur d'autres abeilles, ce qui leur feroit

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un grand mal. Dans le dévoiement cet inconvénient arrive, parce que les abeilles n'ayant pas assez de force pour se mettre dans une position convenable les unes par rapport aux autres, celles qui sont au-dessus, laissent tomber sur celles qui sont au-dessous une matière gluante qui leur bouche les organes de la respiration. Or, si on se rappelle ce que nous avons dit au chapitre premier du quatrième livre, sur les organes de la respiration des abeilles, d'après M. Geer, on verra qu'il est très-important de porter remède à cette maladie. Quoi qu'il en soit de la facilité avec laquelle elle se communique aux abeilles, nous n'en connoissons point les ravages dans le Levant. Tout ce que nous observons quelquefois dans nos ruches, c'est une matière un peu moins dense que la molividhe, mais à peu près de la même couleur, et dont les abeilles se déchargent sur le couvercle et sur les parois intérieures : les rayons n'en sont jamais souillés, au moins ne m'en suis-je jamais aperçu; mais je puis assurer que ni moi, ni aucun de nos cultivateurs, n'avons jamais perdu une ruche par cette maladie. Le flux de ventre des abeilles a été occasionné par diverses causes, dit un auteur moderne; il a été attribué, par les

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uns au miel nouveau qu'elles mangent l'hiver; par les autres au défaut de cire brute, c'est-à-dire de molividhe, dont elles manquent, et qu'on regarde comme une partie essentielle de leur nourriture, sentiment qui est aussi celui des cultivateurs de l'île de Syra; par d'autres aux fleurs de tithymale, d'orme ou de tilleul, sur lesquelles elles vont chercher le miel. Aucune de toutes ces assertions n'est prouvée : le seul fait qui mérite attention, est une expérience de M. de Réaumur. Ce savant observateur a nourri de miel seulement, pendant un certain temps, des abeilles qu'il tenoit renfermées : elles ont toutes été attaquées du dévoiement; mais ce dévoiement est-il dû à la privation de cire brute, ou au principe de cette maladie qui s'est développée pendant l'expérience, ou à l'air altéré que les abeilles ont respiré, étant ainsi renfer mées? voilà ce qui n'est pas éclairci par l'expérience de M. de Réaumur. « Mais je croirois

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plutôt, dit M. Ducarne, que cette maladie « ne leur vient que d'avoir été trop long-temps « renfermées dans leur ruche; car je n'ai jamais << vu mes abeilles et celles de mes voisins, attaquées de cette dangereuse maladie, qu'à la sortie de l'hiver et au commencement du prin

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⚫ temps. Deux raisons me confirment dans cette « idée : la première, qu'après l'hiver, dans les * deux ou trois premiers jours de leurs sorties, " on les voit se vider toutes, et se débarrasser « d'une espèce de bouillie d'un rouge jaunâtre, « dont elles ont toutes le ventre gros ét rempli. Ceci me semble d'autant plus probable, que « pour peu de temps qu'elles aient été renfer« mées, ne fût-ce que pendant quinze jours, une bonne partie des ruches se vide d'elles « même. Il n'y a de différence que du petit au grand; elles en jettent moins alors,» Je crois donc que celles qui sont attaquées de dévoiement, sont les abeilles les plus mal constituées, et dont la disposition ne s'est point trouvée assez bonne pour résister au long séjour de ces matières dans leur corps. Cette matière s'y corrompt sans doute à la longue, et celles qui ne sont pas d'une bonne constitution, ne peuvent y résister, et sont attaquées de cette maladie qu'on nomme dyssenterie. Ceci paroît d'autant plus vraisemblable, que, dans les ruches malades, cette matière a changé de couleur, et qu'au lieu de rouge jaunâtre, elle est devenue presque noire et d'une odeur insupportable; ce qui est le plus mauvais signe pour celles qui en sont

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